jeudi 4 février 2010

Drôles de libéraux-radicaux

Descendue du ciel de la Berne fédérale, la fameuse analyse Vox est venue éclairer les esprits sur le « pourquoi » de l’adoption du texte anti-minaret. Les résultats furent traités avec une diligence presque suspecte. Beaucoup s’attendaient à des platitudes et ils ne furent pas déçus. Les femmes de gauche furent pardonnées, le clivage gauche-droite bétonné et l’institut GFS de Claude Longchamp crucifié. L’homme au nœud papillon a beau se démener, même les sacro-saintes analyses Vox n’échappent pas à quelques critiques méthodologiques sérieuses.
Mais le fait le plus surprenant est ailleurs : 60% des personnes se disant d’obédience libérale-radicale ont glissé un oui dans l’urne. On peut contester les détails, mais la tendance générale est claire. C’est notamment plus que les PDC, dont on redoutait pourtant le vote quasi identitaire autour de la place de la religion dans la cité.
La question peut paraître abrupte, elle n’en est pas moins essentielle : est-il compatible de se réclamer du libéralisme des Radicaux tout en soutenant une initiative comme celle de l’UDC ? Le fait que le parti libéral-radical ait opéré, lentement mais néanmoins sûrement, un glissement vers la droite peut être discuté, soupesé et certainement regretté. La question qui se pose dans le contexte des minarets est toutefois plus fondamentale : la ligne rouge n’a-t-elle pas été franchie par tous ces « Libéraux-Radicaux » ayant choisi la discrimination et le populisme des peurs plutôt qu’un discours raisonné et imprégné des valeurs du libéralisme politique ?
De manière fondamentale, le libéralisme politique se caractérise par une position que l’on dira « positive » vis-à-vis de l’Autre. A défaut de pouvoir montrer qu’une personne représente un danger pour la communauté, cette personne doit être traitée avec égards. Outre son caractère ouvert sur le monde et sur la différence de l’Autre, cette individualisation a pour effet immédiat de rendre illégitime toute discrimination envers un groupe de personnes.
Ce postulat appelle également une politique marquée par la responsabilité et le bon sens. Les décisions se prennent sur une base concertée, à l’aune d’arguments rationnels et bien établis. Il s’agit là de principes fondamentaux et non négociables pour quiconque souhaite s’inscrire dans l’histoire intellectuelle du libéralisme politique. Pour les autres, un changement radical s’impose certainement.

Johan Rochel
www.chroniques.ch

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