lundi 29 octobre 2012

De la démocratie en Amérique – bis repetita



Au fil des analyses, l’observation a pris la forme d’une boutade : nous devrions tous pouvoir voter lors de la prochaine élection américaine. Le futur résident de la maison blanche exerce une telle influence sur le monde que chacun se sent appeler à donner son avis. En d’autres mots, choisir le président américain, c’est un peu l’affaire de tous. 
 
Comment expliquer cette intuition « démocratique » ? Fondamentalement, il s’agit de reconnaître l’influence qu’exerce le président américain sur l’ensemble de cette planète. Pour certains, il s’agit d’une influence directe, à l’image des migrants mexicains qui attendent la fameuse réforme de l’immigration promise par Obama. Cette influence est également très importante lorsque le président, dans ses habits de commandant en chef, décide ou non de frapper la Syrie (et d’entrainer ses alliés). Elle l’est également lorsque les Etats-Unis refusent de signer la convention de Kyoto, participant ainsi à l’aggravation de la crise climatique. 

Si cette influence est indéniable, permet-elle de justifier un droit de participation démocratique ? Les migrants mexicains, les alliés militaires et tout un chacun devraient-ils être associés à la votation américaine sous couvert qu’ils sont influencés par le résultat du vote? Certains théoriciens de la démocratie pensent qu’une telle piste devrait être suivie. Quoiqu’il en soit sur le fond, elle apparaît en tous les cas difficilement réalisable. Nous passerions notre temps aux urnes dans une sorte de grande démocratie globale.    

A défaut de cette solution « extrême », notre intuition révèle la puissance de l’idéal démocratique : les individus soumis à l’influence d’une autorité devraient avoir un moyen de faire entendre leurs voix et leurs intérêts. Le cœur de cet idéal semble être de diminuer les risques de domination, ces situations où nous sommes à la merci des décisions prises par d’autres, sans possibilité de faire valoir notre avis. De nombreuses constellations de notre quotidien pourraient être interrogées à la lumière de cet idéal démocratique. Pensons au fonctionnement de l’économie: comment organiser l’entreprise de manière à prendre des décisions tout en étant attentif aux besoins et intérêts des collaborateurs ? Pensons au droit de vote des étrangers présents en Suisse : comment faire en sorte que leurs intérêts sont pris en compte au moment de décider d’une loi qui s’appliquera à tous, même à ceux qui n’ont pas le droit de participer ? Pensons à notre politique étrangère : comment s’assurer que nous tenons compte des individus ou pays qui seront influencés par nos choix ? Les défis démocratiques sont posés. Comme Tocqueville dans l’Amérique du 19è, il ne nous reste plus qu’à nous mettre en chemin.  
Johan Rochel
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