jeudi 17 septembre 2009

Ces objets qui changent la vie

Face aux grandes inventions, il est habituel de s’exclamer: mais comment ferait-on pour vivre sans ? A quoi ressemblerait le quotidien sans électricité, sans internet, mais également sans voiture ou pilule contraceptive? Cette question plonge dans une vague rêverie où, à mi-chemin entre mélancolie et réjouissance, on s’amuserait à penser un monde radicalement différent.

Face à ces objets dont l’arrivée bouleverse le quotidien, il est plus rare de se demander comment faire pour vivre avec. Car ces objets ont en commun de s’imposer rapidement à nous. Ils ne viennent pas répondre à un besoin secondaire, mais satisfont (ou bien souvent créent) une demande considérée comme très importante. Et c’est cette immédiateté de l’objet – cet étrange sentiment du « là-depuis-toujours » - qui rend une thématisation de son influence sur nous difficile.

Et pourtant, il est clair que ces inventions changent durablement notre façon de nous définir, ainsi que notre façon d’interagir avec les autres. Deux exemples banals pour illustrer le propos. Prenons tout d’abord internet. A n’en pas douter, les changements à mettre au compte du net forment une liste à rallonge. Pour me concentrer sur un point précis, internet a bouleversé notre manière d’appréhender le savoir. Face à la quantité d’informations proprement ingérable que le net nous amène à portée de clic, certains chercheurs appellent de leurs vœux de nouvelles méthodes d’apprentissage. Il ne s’agirait plus d’acquérir une quantité de connaissances, mais surtout de développer la capacité de mettre à jour son savoir et la faculté de rechercher de manière ciblée de nouvelles sources d’informations.

Dans la même veine, il apparaît difficile de bien saisir l’incroyable portée de l’arrivée du téléphone portable dans nos vies. Et cela justement contraste avec son naturel apparent ! Car pour toute une génération, les interactions sociales sans téléphone portable seraient radicalement impensables. Et dans cette vaste famille du vivre ensemble, la relation amoureuse n’a pas échappé aux remous provoqués par le natel. Les règles de la relation amoureuse, mais également la signification de l’indépendance et de la sphère personnelle face à l’être aimé(e), subissent de plein fouet le « toujours-atteignable ». Et le fait que Monsieur ou Madame puisse découvrir les écarts du partenaire en surprenant un message n’est certainement que la partie visible de l’iceberg.

Johan Rochel

www.chroniques.ch

vendredi 4 septembre 2009

L'été indien de la Berne fédérale

Malgré une configuration de départ prometteuse, l’été fédéral 2009 laisse un goût d’inachevé. Alors que Pascal Couchepin annonçait son départ aux premiers beaux jours, les météorologues de la capitale prévoyaient un été politique à la chaleur moite. Sous bien des aspects, il le fut.

Autour de la représentation de la Suisse romande par un bilingue, de la fameuse alliance latine ou encore des luttes fratricides au sein des libéraux-radicaux, les débats furent souvent enflammés, parfois superficiels. Il semble toutefois faux d’en déduire qu’ils furent inutiles. Comme l’a rappelé Pascal Couchepin dans son discours prononcé à l’occasion de la Fête Centrale des Etudiants Suisses à St-Maurice, la Suisse fonctionne sur un modèle d’intégration. Tous les acteurs concernés doivent avoir voix au chapitre, sous peine de voir l’entier du système se bloquer. Dans la joyeuse cacophonie estivale de la politique suisse, les orateurs de tout poil se sont pressés au portillon.

S’ils n’ont ainsi pas été complètement dénués de sens, les débats estivaux ont tout de même manqué plusieurs cibles. Les débats de fond sur les grands chantiers nationaux ont été abordés par les différents candidats et leur parti sur le mode de l’effleurement, combiné à un usage savant de la langue de bois. Les visions de société, outre quelques lapalissades bien huilées sur le libéralisme, n’ont malheureusement pas su provoquer l’enthousiasme du grand public.
Mais laissons de coté ces quelques regrets. La succession Couchepin est entrée dans sa dernière ligne droite, atteignant son apogée lors de la nuit des longs couteaux. Dans les couloirs feutrés du palace Bellevue, les amitiés partisanes seront mises à rude épreuve. L’exigence est pourtant clair : il faut le meilleur des candidats. Alors que le conseil fédéral souffre de graves problèmes de gouvernance, les réformes institutionnelles nécessaires prendront encore beaucoup de temps. Dans l’intervalle, seule la personnalité la plus à même de tisser des liens entre les différents acteurs pourra accomplir sa tâche de manière satisfaisante. Puisse l’été indien inspirer les parlementaires et les amener à prendre la bonne décision.

Johan Rochel
www.chroniques.ch